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  • Photo du rédacteurNatacha de Santignac

Angharad Elliott - Sur les traces de Vermeer

Angharad Elliott a cinq ans lorsque le tableau, Femme écrivant une lettre et sa servante, peint par Vermeer en 1670-1671 s’offre à son regard. Peu impressionnée, elle déclare à Sir Alfred Beit, collectionneur, qu’elle préfère celui accroché juste à côté, un Metsu, autre maître néerlandais du siècle d’or. Apollon, attentif aux yeux éblouis de la petite, unit alors son destin à l’art de raconter des histoires.


Dans la foulée, Angharad Elliott s’inscrit au concours d’art de son école, et le remporte en peignant des tournesols inspirés de ceux de Van Gogh. À treize ans, elle rejoint un photo club où elle apprend les techniques de prise de vue, mais également les gestes pour tirer ses clichés. Sa passion pour l’art la pousse à vouloir l’étudier, mais son père fiscaliste « envisageait un métier plus sûr », et lui accorde de suivre un cursus de Néerlandais. Angharad possédait des prédisposition linguistiques. En effet, les cours de sa première école à Dublin étaient dispensés en irlandais, en anglais et en espagnol. Elle se souvient encore avec tendresse de ce lieu où elle retrouvait ses cousins. « Habiter à Dublin, c’est comme de vivre dans un village ». Finalement, Angharad parviendra à ses fins, car après son Bachelor à l’University College London, elle partira pour les Pays-Bas, et commencera à étudier les grands maîtres, dont Vermeer et Rembrandt, à l’université de Leiden.


Du Swiss cottage de Cahir au chalet de Verbier

L’enfance irlandaise se teinte de souvenirs heureux. « Nous avions une grande liberté. Les adultes ne nous donnaient pas de règles strictes. Mes terrains de jeux ? Des châteaux, des constructions préhistoriques ou le Swiss Cottage du village de mes grands-parents entouré de montagnes. J’imaginais qu’un jour, je construirais mon propre chalet. L’architecture et la montagne m’attiraient déjà ». Après ses études aux Pays-Bas, Angharad devient chercheuse en œuvres d’art spoliées durant la seconde Guerre Mondiale à Londres. Rapidement, les montagnes lui manquent. Des souvenirs de vacances en montagne ressurgissent, et elle achète un appartement à La Tzoumaz. « Au début, je venais pour les week-ends, puis j’ai tenté un travail saisonnier sur les pistes, tout en faisant des traductions. À la fin de la deuxième expérience, je ne suis pas rentrée. J’habite toujours à Verbier, et j’ai construit mon Swiss cottage ! »

 

De la langue de Wilde à celle de Horst P. Horst

Avec son bagage linguistique et universitaire, Angharad enseigne l’anglais au Bouveret, dans une école hôtelière, puis donne des cours d’histoire de l’art. Elle prend doucement racine dans un environnement en résonance avec celui de son enfance : du mouvement, des langues, et un Swiss Cottage dont la construction lui donne l’occasion de reprendre sa camera obscura : « Je venais beaucoup sur le chantier, et j’ai créé, sans le savoir, un reportage sur ses avancées. Quelques amis ont vu mes images, dont un directeur d’agence de locations à Verbier. Il m’a proposé de photographier des appartements pour son catalogue. J’ai appris en faisant, mais mes expériences visuelles m’ont été très utiles ». Progressivement, d’autres agences font appel à ses services, puis des décorateurs d’intérieur et des architectes.

 

La boucle se boucle

Le travail de la lumière et une mise en scène précise de chaque objet dans les lieux, en collaboration avec les propriétaires, les architectes et les décorateurs, créent une harmonie permettant à l’âme des intérieurs de se révéler. L’histoire du lieu est saisie grâce à l’appareil photo. « L’important est de raconter pour transporter le lecteur vers un ailleurs. Exactement comme le font les tableaux de Vermeer. Ses scènes, en apparence banales, tirées du quotidien, étaient étudiées dans le moindre détail. Elles emportaient les Néerlandais à la découverte du monde, leur suggéraient l’attente, leur rappelaient leurs traditions et leur savoir-faire. Ses commanditaires se projetaient dans ces imaginaires sécurisants et accueillants ».

 

Pour Angharad Elliott, le plaisir de la photographie s’apparente à celui éprouvé lors des jeux de l’enfance en Irlande. Elle a gardé une capacité d’émerveillement intacte, tout en maîtrisant la technologie pointue de la photographie. Chaque décor apparaît directement sur son ordinateur, ainsi tous les ajustements nécessaires se voient avant le clic final ouvrant le chemin du rêve, qu’Angharad, telle une conteuse irlandaise millénaire, se délecte à tracer.

 


Rire de tout, surtout de soi. @Natacha de Santignac

 

 

 

 

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